Odyssée 1

J’ai quitté les rivages surpeuplés pour l’aube naissante

Dans la fraîche pureté d’une rosée immatérielle.

Mon esquif me guida loin des cités putrescentes

Où je suivis le fiat occulte de signes providentiels.

Ivre d’un besoin inhumain de solitude farouche

Pour goûter en secret la joie-douleur des morsures de l’âme

J’ai navigué en gonflant la voile du silence sur ma bouche

Scellant ma destinée muette en brûlant le Verbe au lance-flamme.

A l’écoute inaudible du Silence suprême

Le mantra éternel qui produit la matrice des mots

J’entendis la neige poudrer les sentiers devenus blêmes

De mes synapses en naufrage sur l’océan tranquille du Tao.

Mes périples me portèrent aux confins de la pensée-mirage

Qu’une divinité a liquéfié en conservant le limon et la tourbe.

Engrangés dans les fonds sous-marins de ma géographie sans-âge,

Ils attendent ce Pouvoir plus grand que l’Immobile pour destituer l’animal fourbe.

Enjambant des monstres marins, j’entrepris une course intrépide

Vers d’éclatantes aurores qui percent les cieux d’orages antiques.

Et dans la ritournelle argentée des cycles sans fin, mon âme impavide,

Telle une torche imputrescible, brûlait dans les sombres escales apocalyptiques.